Derrière ses incontournables têtes d’affiche, l’édition 2014 d’Au Foin de la rue recèle, comme d’hab’, de promesses alléchantes. Pour son 15e anniversaire, le festival dyonisien poursuit son exploration de la foisonnante scène electro hip-hop actuelle et confirme son goût pour les dynamiteurs de genres, mixant dans un même festin world music, electro, reggae…
Tranzistor vous livre son menu, par définition incomplet, des réjouissances à ne pas manquer.

Passons vite sur les têtes d’affiches (même si on ira écouter avec plaisir les inoxydables Morcheeba, le vrai faux gitan Goran Bregovic ou le phénomène Staff Benda Bilili) pour se pencher sur le cas d’artistes (sans doute) plus confidentiels mais tout aussi excitants.

Valeur sûre

Commençons par de vieilles connaissances : Winston McAnuff & Fixi ont déjà trainé leurs guêtres dans nos contrées. Séparément ou ensemble : le chanteur jamaïcain et l’ex-accordéoniste de Java présentaient aux Ondines il y a quelques mois leur second album, A new day. Un cocktail improbable, inclassable et abouti, où le chant rauque (rock ?) inimitable de McAnuff s’enchâsse sur des syncopes reggae ou afro-beat, orchestrées par l’accordéon inventif du génial Fixi.
Signataire d’albums de pure reggae roots il y a quelques décennies, Sieur McAnuff semble aujourd’hui vouloir échapper à tous les codes. Sur scène, complètement lâché, comme en plein trip, il dégage une énergie incroyable, amplifiée par l’étonnante complicité qui le lie à Fixi, de plus de 20 ans son cadet. Inloupable. [vendredi 4 juillet | 21h05 | scène B]

 

Autre valeur sûre, et tout aussi inclassable, les Belges de DAAU résistent à toute tentative d’étiquetage. Mouvante et cinématographique, la musique instrumentale du quatuor (un temps étroitement associé au groupe Ez3kiel) n’affiche pas d’autres ambitions que de raconter des histoires (sans parole). Un genre de musique classique d’aujourd’hui, associant instruments acoustiques (accordéon, contrebasse, clarinette et batterie) à de discrets effets électroniques.
À voir sur scène pour la performance et l’engagement total des musiciens. Un concert que leur très réussi dernier album, Eight definitions, achève de rendre incontournable. Vous ne devriez pas être déçu du voyage ! [samedi 5 juillet | 21h05 | scène B]

 

Prometteur également, le groupe bretonno-yankee St-Lô, depuis son éclosion en 2012, franchit les étapes à vitesse grand V (programmation aux Transmusicales en 2013, belle tournée des salles et des festivals en 2014…). Et partout où il passe, les prestations scéniques du quatuor remportent les suffrages à l’unanimité.
Ici encore, pas de case, ni de catégorie, St-Lô surfe en hors-piste : tout juste le groupe accepte-il de relier sa musique au blues. Pas tant sur la forme que sur le fond : guidé par ce même désir d’aller à l’essentiel, de connecter sa musique directement aux émotions. Quand la voix étrange et profonde de l’Américaine Mezz Walidah fusionne avec le groove sombre et les beats futuristes de iOta, un ange passe, et nous emmène direct au 7e ciel. [vendredi 4 juillet | 1h35 | scène B]

 

Autre valeur montante de la scène electro hip hop frenchy, Chill Bump manie lui aussi les beats et les scratchs avec virtuosité. Pas loin de C2C ou Wax Tailor dont il a assuré récemment les premières parties, le duo tourangeau renoue avec les bonnes vieilles recettes du hip hop des familles : 1 DJ et 1 MC, un flow à l’américaine super fluide, des beats qui claquent sa mère, des basses qui ronflent et des samples vintage (cordes, accordéon…) savamment sélectionnés. Bref, un hip hop inventif, produit au millimètre, qui s’annonce irrésistible en live. Yes papa ! [vendredi 4 juillet | 21h05 | le chap’]

Hip hop lovers

L’air de rien, Au Foin de la rue est l’un des rares festivals qui accorde une place de choix au hip hop, de préférence sombre et cracra (plutôt que festif et bling-bling). Un choix, impulsé depuis quelques éditions, que le festival affirme encore davantage cette année puisque, aux côtés de Chill Bump, les amateurs de hip hop pourront se briser la nuque sur les beats de l’impressionnant Bristish Stig of the dump. Débit cru et tranchant, productions electro abrasives et bien fats, le rappeur anglais est précédé d’une réputation de bête de scène, qu’il devrait confirmer au Foin. [vendredi 4 juillet | 21h05 | le chap’]

 

À surveiller aussi de près rayon hip hop : le rap dubstep, hypnotique et brut, des Anglais de Virus Syndicate, le crossover electro hip hop du collectif sud-africain Cape Town Effects ou l’abstract hip-hop du producteur français Al’tarba.

Sono mondiale

Outre son penchant pour le hip hop, le Foin, via son programmateur Max Leduc, affiche aussi un goût prononcé pour les musiques du monde, de préférence assaisonnée façon electro et en provenance des Balkans, de l’Afrique ou de l’Amérique latine.
Démonstration cette année avec The Gipsy sound system orkestra et surtout le Mexican institute of sound. Dirigé par un seul homme, le producteur mexicain Camilo Lara, cet institut sonique assemble ingénieusement rythmes électroniques, basses synthétiques, trompettes mariachis et samples de vieux vinyles de cumbia. Une sorte de Chinese Man mexicain, avec en prime un discours dénonçant le climat de violence et de corruption qui règne dans son pays, gangrené par le narcotrafique. [vendredi 4 juillet | 2h40 | scène A]

 

Que diriez-vous d’un petit coup d’afro-beat pour conclure ces ripailles en beauté ? Mené par 9 jeunes Hollandais (à peine 20 ans de moyenne d’âge !), Jungle by night revitalise l’afro-beat, et vient prouver que la musique inventée par Fela Kuti n’a rien perdu de son actualité et de sa force.
Incursions electro, digressions ethio-jazz ou apartés rock psyché, groove mortel et son énorme : le nonet batave s’est déjà imposée comme une référence à l’international (80 dates en 2013 dont Sziget, North Sea Jazz Festival, Lowlands, Eurosonic, Paradiso…). Pas mal comme digestif, non ? [vendredi 4 juillet | 23h25 | scène B]