Nous étions prévenus, le double EP sorti l’année passée en était l’artefact annonciateur : As We Draw allait frapper un grand coup avec la sortie de son premier album. L’aventure Hard Off Hearing dans le rétro, le trio embraye et nous livre ce Lines Breaking Circles, double album vinyle à l’artwork impeccable. Formation resserrée donc, mais le son est là, ample, lourd et prégnant. Si le premier titre ouvre les hostilités sans sommation, c’est « Sin Of Addiction » qui se charge de donner l’assaut, et mieux vaut être préparé, chants et riffs montent brutalement et prennent aux tripes. La voix de Quentin, chanteur et guitariste du groupe, impressionne, violente, enragée, toujours sur la corde raide, elle est la pointe saillante, le vecteur ultime de leur musique. Là où d’autres répètent des schémas mille fois entendus, eux s’ouvrent à des compositions sans structures préétablies, à la fois débridées et parfaitement maîtrisées. Le passage à la face B permet de reprendre doucement son souffle, juste ce qu’il faut pour voir venir « Fault Lines », un titre à l’architecture complexe où la puissance vocale est à la hauteur du déchaînement rythmique, six minutes d’un venin sonore qui laisse l’auditeur abasourdi.
Résolument sans concession, la musique d’As we draw se construit, mue et explose à chaque instant en déluge dévastateur. À l’entame de « Scum Of The Earth », on a déjà compris que le combat était inégal, que nous n’avions pas les armes… Mais à l’heure de la reddition jaillit soudain un sentiment qui ressemble à un pur moment de plaisir.