Ce ne peut pas être un hasard. Joss chantait dans un groupe qui s’appelait Djamôn. « Lucky Luke contre Joss Jamon » ressurgit de ma mémoire d’enfant. Et alors ? Eh bien, vous lui demanderez, à Joss. Car à vrai dire, il ne fait pas de la musique de western, et son sourire est l’exact opposé du méchant patibulaire. Tout juste peut-on rappeler qu’il vient d’un Far West, puisque Joss est né il y a plus d’une vingtaine d’année en Haïti.
Déraciné, Joss se crée son monde par la musique, qu’il revendique métissée. De fait, l’intéressé évoque pêle-mêle Téléphone, Keziah Jones, Sting, Bob Marley, Zazie, Tété, Cabrel, le 3e Oeil, Passi, Radiohead, Bjork, Cesaria Evora…
Cela peut paraître surprenant, mais on retrouve une pincée de tout cela dans les ballades de ce Carnet de voyage. Les airs sont classiques comme la pop, l’esthétique entre acoustique et wah-wah. Quant au rap, Joss ne se risque pas à l’art du flow-débit, mais y fait quelques clins d’oeil, notamment sur « Je me souviens », et… c’est séduisant. En toile de fond, le blues et l’Afrique ne sont jamais loin. La touche africaine est apportée par les percussions (il n’y a pas de batterie) et par les sujets (« L’Arbre à palabres »). Joss ne cherche pas à épater la galerie mais à éveiller les consciences. Il parle du monde, de sans-papiers, d’exil. Comme certains chanteurs africains, il n’a pas peur d’aborder des thèmes casse-gueule parce que trop consensuels, comme l’atrocité des guerres (« Plume qui tombe », « Saule pleureur blessé »). Si on admet ce style direct, il s’en sort bien, car la sincérité parle.
Finalement, on sent qu’avec ses mots, il rêverait d’être Lucky Luke, le justicier.
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