Mais d’où vient toute cette musique ?!

C’est une pratique qu’on associe généralement au hip-hop mais ça existe depuis toujours. Dans l’absolu, on pourrait décrire ça comme l’art de faire de la musique avec sa bouche. Dans les années 70, le hip-hop en a fait une discipline à part entière. À l’origine, les human beat-boxers faisaient des rythmes pour soutenir le débit des rappeurs quand ceux-ci n’avait pas de boîte à rythmes ou de platines sous la main. Puis le genre s’est développé avec des beat-boxers comme Doug E. Fresh, Biz Markee… Plus tard des gens comme Rahzel, qui reste la référence absolue en matière de beat-box, Killa Kella, ou Saïan Supa Crew en France, ont contribué à faire évoluer le beat-box et à le populariser. Mais le beat-box ne se limite ni au hip-hop, ni au rythme : on peut tout faire avec sa bouche. C’est ça qui est terrible, tu peux faire de la musique avec rien. C’est accessible à tous, pas besoin d’acheter d’instrument ou de prendre de cours.

D’où vient ta musique ? Quelles sont tes influences ?

Je crois que j’ai toujours fait du beat-box, sans le savoir. Depuis que je suis gamin, je fais des bruits avec ma bouche pour me marrer. J’ai toujours été attiré par la batterie, peut-être qu’inconsciemment c’est ce qui m’a amené à reproduire des rythmes, à jouer de la batterie avec ma bouche. C’était un truc naturel pour moi, pour délirer, comme on chante sous la douche. Aujourd’hui encore j’ai du mal à comprendre l’engouement que ça suscite… Si des potes ne m’avaient pas poussé à jouer dans des soirées, des petits concerts, je crois que j’en ferai toujours pour moi, comme ça. Donc, je n’ai pas vraiment d’influence en beat-box. Bien sûr j’apprends toujours en écoutant Rahzel par exemple, mais pas au niveau technique. J’ai appris ces techniques seul, en autodidacte. En fait même si, à la base, j’ai une culture hip-hop, je suis influencé par tout et n’importe quoi, par des disques mais aussi par des films, des sons de tous les jours, entendus par hasard. Au final, ça peut paraître bizarre, mais je m’aperçois qu’une bonne partie de la musique que je crée ne correspond pas du tout à ce que j’écoute.

La recherche d’une originalité, d’une personnalité musicale représente quelque chose d’important pour toi ?

Pour beaucoup de gens, le beat-box, c’est nouveau donc original. S’il y avait seulement 2 personnes au monde à jouer de la guitare, je pense qu’ils susciteraient autant d’étonnement qu’un beat-boxer aujourd’hui. Au départ, lors de mes premiers concerts, je reproduisais principalement des standards de hip-hop ou de R&B, des bruitages, le genre de trucs techniques que les gens attendent généralement d’un beat-boxer. Mais depuis quelques temps, j’essaie de m’éloigner de ça. Ça ne m’intéresse pas de juste recréer des morceaux. Bien sûr je continuerai à jouer certains standards que j’adore et j’ai bien conscience que le côté technique fait partie du délire beat-box, mais j’ai envie d’aller vers quelque chose de plus musical et personnel. De jouer mes propres compos. Ça me permettra peut-être de casser cette image de bête de foire qui colle à la peau des beat-boxers. J’ai envie d’être reconnu comme musicien plus que comme beat-boxer. Mais c’est un défi de créer quelque chose de musical à partir d’une technique essentiellement rythmique. Et puis, c’est super difficile de construire un morceau complet avec une seule voix, en une seule fois et sur une seule piste !

La musique doit-elle pour toi porter un message, une signification ? Que veux-tu exprimer à travers ta musique ?

Je n’ai pas envie de faire du beat-box uniquement pour le fun, pour le délire technique. J’ai envie d’exprimer quelque chose et de communiquer ce que je ressens. Faire ressentir au public ces « fucking » frissons qui me traversent la colonne vertébrale quand je suis sur scène. C’est aussi une façon d’exorciser ses problèmes, ses difficultés… la musique c’est toujours un peu un truc de mec barré, non? Après y a pas forcément besoin d’explication, de mots pour restituer un sentiment. Sinon la musique instrumentale n’aurait pas lieu d’être. La voix, sans parler de chant, permet d’exprimer une émotion mieux que tout instrument. Il n’y a pas d’intermédiaire, tu peux exprimer ce que tu ressens directement, de toute ta voix, de tout ton corps.

Quelle expérience as-tu des festivals? Qu’est-ce que cela représente pour toi d’y jouer ?

Je n’ai pas une grosse expérience des festivals. J’ai joué principalement sur des petites scènes lors de soirées, de petits festivals et aussi lors de « pseudo » soirées hip-hop pourraves où j’ai l’impression que les gens viennent plus pour se montrer qu’écouter de la musique. Au contraire, sur les festivals, tu sens que les gens sont là pour écouter de la musique, découvrir des artistes… C’est hallucinant de réaliser que des milliers de personnes sont réunies dans le même endroit pour la même chose : écouter de la musique. Ce que j’aime en festival c’est l’éclectisme de la programmation, la grande variété de styles musicaux qui sont proposés, ça crée des échanges, des brassages et ça permet des rencontres. Regarde ce soir j’ai pu jouer avec les 2 guitaristes de Mon coté punk et le chanteur de Java… C’est énorme! Et puis en général, les mecs qui organisent les festivals sont cools, des gens comme toi avec qui tu peux discuter, délirer… C’est souvent à l’origine une bande de potes qui font d’abord ça pour le plaisir. Et ça se ressent forcément dans l’ambiance du festi. Il y a un coté convivial, familial que tu retrouves pas ailleurs.

Qu’est-ce que c’est pour toi un bon festival ?

J’aime les festivals qui restent conviviaux, où tu as un minimum d’espace vital. J’ai un peu peur de la foule. Ceci dit jouer aux Vieilles Charrues, ça doit être énorme, se sentir soutenu et soulevé par 50 000 personnes… Après c’est vrai que comme spectateur, j’hésite à deux fois. Sinon, j’aime bien les festivals qui laissent la place à des découvertes, des jeunes artistes, qui accordent de l’importance à l’ambiance, la déco. Où tu peux te balader, regarder des spectacles de rue. Un peu comme au Foin de la Rue quoi!